TRAUMATISME PSYCHIQUE OR NOT
TRAUMATISME PSYCHIQUE ?
Les médias nous abreuvent régulièrement de sujets surfant sur le syndrôme de stress post traumatique (SSPT). D’autant plus quand il s’agit de faire l’actualité sur un événement sordide ! De ce fait, nous assimilons insidieusement que de nouveaux événements, à haute charge émotionnelle, sont souvent sources de traumatisme psychique. Il est souvent fait état par des raccourcis de langage de trauma. Parce que cette notion a pris une place importante dans notre vocabulaire, il n’est pas rare d’entendre plus directement le terme de sidération, PTSD (Post traumatic Stress Disorder). Sommes nous tous traumatisés psychiques ?
Parce que nous sommes tous exposés à des événements difficiles, sommes nous pour autant tous concernés ? Traumatisme psychique or not traumatisme? Article écrit par Caroline Vieilleribière, psychologue et psychothérapeute à Mont de Marsan.
Qu’est-ce qu’un événement traumatique?
Il n’est pas question de constituer une liste exhaustive des événements potentiellement traumatisants. Ce qui fait le traumatisme psychique c’est la rencontre entre 3 éléments : la personne elle-même, à un instant T avec l’événement lui-même. Ce dernier est constitué d’une ambiance particulière. Celle de la grande faucheuse. Car quelque soit l’événement, il raconte soit : le face-à-face de la personne seule avec sa propre mort ; soit le réel de la mort rencontré chez un autre ; enfin la mort à grande échelle
- Le face-à-face avec la grande faucheuse
La personne se voit mourir. J’ai bien cru que j’allais y rester ,… cette fois-ci c’est fini !
Exemple : Au travail, l’agression d’un surveillant par un détenu : l’image du regard du détenu avant le passage à l’acte agressif sur la personne. Son regard meurtrier fixé sur moi.
- La mort dans la réalité pour un autre
Cet autre est souvent quelqu’un de proche. Un binôme de travail, un parent. La personne a vu son proche mourir.
Exemple : deux policiers en train de parler sur la voie publique et l’un d’entre eux qui regarde le visage de son collègue, remarque une tâche rouge s’agrandir sur l’abdomen de son binôme, avant qu’il ne tombe, mort ( touché par balle)
- La mort à grande échelle
Elle frappe un grand nombre de personnes. Le corps des victimes est en très mauvais état.
Exemple : deux personnes touchées lors d’un attentat où une masse de personne décède en même temps.
Synthèse :
Sans les dénombrer en détails, les événements potentiellement traumatiques concernent une perception ou une sensation directe. Ainsi la même scène vue au cinéma n’a pas ce pouvoir car elle est par définition sur écran. L’événement potentiellement traumatique, quant à lui, ne peut pas être mis à distance. La personne y est confrontée par ses sens : la vue, l’ouïe, parfois l’odorat ou le toucher ou la cénesthésique (conscience confuse de sensations émanant de la profondeur du corps).
Ce qui définit le syndrome de stress post traumatique
Pour qui ?
Si l’on considère que l’état de stress post traumatique est provoqué par le triptyque de la rencontre entre une personne, à un instant T avec un événement…Maintenant que nous venons de définir la singularité de l’événement, que se passe t-il pour cette personne?
Cette personne c’est potentiellement vous ou moi. Cela peut être tout le monde. Il n’existe rien qui puisse nous prémunir de développer un jour un syndrome de stress post traumatique. Cependant une personne qui va vivre un événement traumatique ne développera pas nécessairement un SSPT. Les enfants sont aussi concernés. Hélène Romano, psychologue l’évoque remarquablement bien.
Que nous disent les études pour y voir plus clair ? Selon l’OMS 6 à 9 % de la population en France seraient concernés par le SSPT. Une personne qui est exposée régulièrement à ce type d’événement est probablement plus concernée. De plus les événements qui surgissent dans l’enfance (maltraitances…), et les situations qui impliquent des composantes sexuelles sont potentiellement plus prédictives pour développer ce type de syndrome.
Symptomatologie
Nous vous proposons les grandes lignes des symptômes les plus centraux.
- L’irruption brutale de l’événement traumatisant, envahissant toute la pensée (appelé dans notre jargon reviviscences). Exemple : J’ai vu son regard comme si j’y étais encore.
- Sentiment de détachement ( les psy pourront parfois reconnaître la dissociation). Johanna Smith psychologue évoque très bien le symptôme de dissociation.
- La rumination mentale pénible sur les conséquences de l’événement : Pourquoi moi ? Pourquoi m’ont-ils fait cela ? Pourquoi suis-je changé, souffrant et diminué ?
- Nous sommes comme hypervigilants. Ainsi on se comporte malgré soit comme si l’événement allait se reproduire : sursauts, etc…Exemple : Je fais des bonds de 3 mètres dès qu’il y a un peu de bruit cela m’épuise…
- Nous évitons ce qui nous rattache à l’événement. ( en pensée, en acte aussi). Exemple : Après l’accident de voiture j’évite de repasser sur les lieux faisant à chaque fois un détour de 5 km.
- Et enfin un autre symptôme possible : L’hallucination, visuelle, auditive, olfactive, gustative, tactile ou cénesthésique en lien avec l’événement traumatique. Exemple : J’étais dans la cuisine quand tout à coup j’ai senti l’odeur de l’accident…
Synthèse
Parfois, en surface d’autres éléments peuvent se manifester. Ces éléments sont souvent les plus visibles et la conséquence d’un éventuel SSPT en racine. Parfois il est question de troubles du comportement alimentaire, de dépression, de sentiment étrangeté vis à vis de soi, du monde, de phobie sociale, d’addictions… Ces éléments ne sont pas toujours très bruyants. Mais intuitivement ils disent à la personne que quelque chose ne tourne pas rond . Parfois une mémoire, où il y a trop souvent des zones d’ombres, peut interroger. Ce constat croisé à d’autres signes peut entrer dans la définition de ce syndrome. C’est pour cela qu’il ne faut pas hésiter à consulter un professionnel qualifié! Je le répète, on peut en sortir !
Question de temps…
Cependant le moment où l’on est confronté à un événement potentiellement traumatique a toute son importance. A quel moment dans son histoire de vie, à quel moment en terme de niveau de santé générale, à quelle date et quelle heure car la mémoire va faire trace, etc…en somme, autant avoir une bonne santé, pas trop de bosses à l’âme au moment où la vague va arriver…
De plus le moment où le diagnostic peut être posé est stratégique. Trop souvent nous voyons évoquer un SSPT en suivant de l’événement. Erreur monumentale! Surtout gardez en tête que pendant un mois (en moyenne) après l’événement, il est normal de développer des symptômes, non ordinaires, suite à un événement lui-même non ordinaire ! C’est donc à l’échelle de ce que l’on a vécu. C’est seulement dans un deuxième temps, seulement après cette période que l’on pourra ou pas poser le diagnostic.
Combien de temps faut-il pour s’en remettre ?
Les patients qui commencent leur prise en charge me demandent souvent combien de temps les soins vont-ils durer ?
Les études sur ce sujet ne sont pas unanimes alors je vous évoquerai mon retour de clinicienne d’un point de vue de l’expérience. Je dirai qu’en moyenne il faut une quarantaine de séances. C’est une moyenne. Ainsi j’ai pu accompagner des personnes sur 20 séances, d’autres sur plus de quarante. Quoi qu’il en soit, il est possible de s’en sortir. Il faut cependant prendre en compte les différentes formes de SSPT, l’histoire de la personne (ses antécédents sur le sujet), d’éventuelles autres comorbidités, c’est à dire d’autres symptômes qui ont pu se développer sur ce tableau clinique en plus. Bref, à chaque fois c’est différent mais l’espoir est permis. Il est possible de s’en sortir sachant qu’il y aura un avant et un après…
Quelles prises en charge pour le traumatisme psychique?
Plus on est pris en charge à proximité de l’événement, plus il sera possible de rebondir par la suite. Pourquoi ? Les études nous indiquent qu’une prise en charge dite de soutien psychologique post immédiate n’a pas vocation à prévenir le développer d’un SSPT.
Cependant elle permet une mise en lien avec un professionnel qui peut par la suite orienter la personne vers un soin adapté. Si un SSPT devait alors se développer, la prise en charge y ferait suite. C’est plus confortable que d’écumer le bottin au hasard de noms de professionnels non identifiés !. Plusieurs outils thérapeutiques sont actuellement utilisés pour traverser cette planète hostile qu’est le SSPT : l’EMDR, l’ICV, le Mindfulness, la psychodynamique, l’hypnose,etc…Il faut souvent plus qu’un thérapeutique. Ainsi un ensemble d’outils choisis à certains moment clés de la thérapie et dans la continuité vous permettra de passer le moins mal possible ce cap. Alors…ne rester pas sur le bord de la route et oser en parler.
Bien défini, cela permet de mettre des mots sur des termes souvent entendus mais pas forcement assimilés. Merci pour cette initiative intéressante.
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